Vendredi 26.09.25, l’hôtel Maliverny à Aix-en-Provence a accueilli un événement inédit : les « Premières rencontres du droit de l’environnement ». Organisé par les commissions droit de l’environnement et droit public du barreau d’Aix-en-Provence, en partenariat avec l’école des avocats du Sud-Est (Edase), ce colloque a rassemblé avocats du barreau d’Aix, de Paris et d’autres barreaux, magistrats, associations, étudiants et citoyens, autour de l’évolution du droit de l’environnement vingt ans après la Charte de 2005. Plus d’une centaine de personnes étaient présentes.
Croiser les regards sur un droit en mutation
Cette première édition s’est distinguée par une forte participation : alors que 80 inscrits étaient attendus, une centaine de personnes, spécialistes et grand public confondus, ont répondu à l’appel. Les interventions de figures majeures telles que Me Monika Mahy-Ma-Tsonga, bâtonnière du barreau d’Aix, de Yann Aguila, ancien membre du Conseil d’État, Arnaud Gossement, avocat qui publie régulièrement des articles consacrés à l’actualité du droit de l’environnement ou encore de Me Didier Del Prête, président de la commission droit de l’environnement du barreau d’Aix-en-Provence, ont permis d’aborder les grands enjeux de cette discipline en plein développement.
Les objectifs de cette journée étaient les suivants :
- Faire le bilan de l’application de la Charte
- Explorer ses usages en droit administratif, civil, pénal et environnemental
- Croiser les regards et renforcer les pratiques professionnelles

Un appel à renforcer la pratique du droit de l’environnement
La journée a offert des tables rondes de haut niveau sur l’effectivité de la Charte de l’environnement, aujourd’hui dotée d’une valeur constitutionnelle mais encore trop peu appliquée dans la pratique juridique, selon de nombreux intervenants notamment son article 1 qui stipule que “chacun a le droit de vivre dans un environnement équilibré et respectueux de la santé.” (1)
Avocats, magistrats, associations et étudiants ont été invités à s’approprier ce droit riche, transversal et en devenir, pour garantir la promotion d’un environnement sain et la protection durable de nos territoires. Le colloque, en ouvrant le débat, incarne une dynamique locale forte et inclusive pour l’avenir du droit de l’environnement.
Selon Richard Hardouin, Président de FNE13, présent à cette journée : “un certain nombre de nos actions ayant franchi le pas du contentieux pourraient s’organiser à l’horizon de la Charte de l’Environnement si au final si le besoin s’en fait sentir. En effet, nous devrions pouvoir rapprocher certaines de nos actions des trois grands principes introduit par la Charte dans la Constitution :-le principe de prévention, celui de précaution, et enfin le principe pollueur-payeur.“
Une question de QPC
Pour Stéphane Coppey, Administrateur en charge du juridique “il faut que de plus en plus de procès menés à l’encontre d’atteintes à l’environnement se fassent sur la base de la Charte et de ses articles afin de lui donner de plus en plus de corps”. En effet, malgré sa force normative, la Charte de l’Environnement rencontre encore des limites pratiques. Son application effective peut dépendre du rôle du législateur et des modalités définies par la loi pour garantir ses principes. Elle représente une avancée majeure, mais son effectivité dépend de son intégration dans l’ensemble du droit français et de son respect dans les décisions publiques et privées.
La valeur constitutionnelle de la Charte de l’Environnement permet d’invoquer ses dispositions dans le cadre d’une Question Prioritaire de Constitutionnalité (QPC). Le Conseil constitutionnel a affirmé que certains articles de la Charte, notamment les articles 1 à 4, sont invocables en QPC et imposent des obligations, telles que le devoir de vigilance environnementale à l’égard des atteintes potentielles à l’environnement. Par cette reconnaissance, la Charte joue un rôle important dans le contrôle de constitutionnalité des lois relatives à l’environnement.
Le lien entre la Charte de l’environnement et la QPC se manifeste dans le fait que cette procédure permet à toute personne de contester la constitutionnalité d’une loi au regard des droits et principes inscrits dans la Charte. Par exemple, dans une décision de 2011, le Conseil constitutionnel a examiné la conformité d’une disposition législative avec les droits et devoirs proclamés par la Charte, en reconnaissant la portée normative des premiers articles de la Charte, notamment en matière de responsabilité environnementale.
Par ailleurs, le Conseil a élargi la portée de certaines règles environnementales dans ses décisions plus récentes, affirmant que le respect du droit à l’environnement doit trouver un équilibre entre la protection environnementale et d’autres intérêts fondamentaux, ainsi qu’entre les besoins présents et futurs. Ainsi, la Charte de l’environnement constitue une base constitutionnelle clé que le juge constitutionnel utilise via la procédure de QPC pour garantir la protection juridique de l’environnement en France.
(1) La Charte de l’environnement de 2004 a valeur constitutionnelle puisqu’elle a été intégrée au « bloc de constitutionnalité » à la faveur de la révision constitutionnelle du 1er mars 2005 (décisions nos 2008-564 DC du 19 juin 2008 et 2014-394 QPC du 7 mai 2014 ). En ce sens, le premier alinéa du Préambule de la Constitution du 4 octobre 1958 est ainsi rédigé : « Le peuple français proclame solennellement son attachement aux Droits de l’homme et aux principes de la souveraineté nationale tels qu’ils ont été définis par la Déclaration de 1789, confirmée et complétée par le préambule de la Constitution de 1946, ainsi qu’aux droits et devoirs définis dans la Charte de l’environnement de 2004 »
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